"Il suffit de son bras soulevé pour arrêter et faire reculer le soleil"
Éléonore False
Du 15 mars au 7 juin 2015
Commissaire : Sandra Patron
À partir de fragments d’images minutieusement collectées au gré de ses lectures, Éléonore False crée un répertoire de formes et de gestes auquel elle applique tout un ensemble de procédures (agrandissement, découpe, évidement, incises, répétitions) qui sont ensuite envisagées dans un rapport sculptural à l’espace. Son intérêt se porte plus particulièrement sur les représentations du corps, qu’elles soient issus de l’histoire de la danse, de l’art ou de livres de médecine.
"Il suffit de son bras soulevé pour arrêter et faire reculer le soleil", le titre de son intervention au Mrac, est une citation extraite de l’ouvrage de Marcel Proust, "Du côté de chez Swann", dans lequel le narrateur analyse sa lente remontée du sommeil, entre rêve et réalité. Si la référence à Proust vaut surtout pour la musicalité de la citation et ce qu’elle suggère en termes de mouvement du corps dans son rapport au soleil, il n’est pas incongru de voir dans les obsessions proustiennes une démarche qui peut nous éclairer sur celle de Éléonore False. Chez Proust comme chez False en effet, l’identité est par essence fragmentaire, et pour se recomposer, le sujet se soumet alors à sa propre dispersion, s’obligeant à briser un confortable modèle d’unicité.Son installation pour le Mrac met ainsi en miroir deux images issues du fond iconographique de l’artiste : l’une représente un homme de profil du peintre italien de la Renaissance Piero Di Cosimo, dont Éléonore False répète le motif du nez ; l’autre provient d’une performance de l’artiste californien Paul McCarthy qui se traîne au sol, laissant derrière lui la trace de son avancée, un mouvement du corps rejoué et augmenté par l’installation de l’œuvre entre sol et mur.
Installée à l’entrée du musée, passage obligé du public vers les expositions, l’installation de Éléonore False nous fait donc naviguer dans les eaux troubles et passionnantes de notre histoire de l’art, entre la posture altière d’une peinture de la Renaissance et celle à la limite du ridicule de l’artiste contemporain Paul Mc Carthy, ou comment à travers les âges, les postures corporelles nous en disent long sur la représentation que nous nous faisons de nous-mêmes.