Carlos Kusnir
Du 4 juillet au 4 octobre 2009
Le musée présente une grande exposition consacrée à l’artiste Carlos Kusnir. La liberté et l’esprit de sa peinture en font un artiste singulier et de tout premier plan. L’apparente maladresse côtoie la virtuosité technique, toujours entre brutalité et délicatesse. Sa peinture est un mélange de fantaisie et de rigueur artistique, de recul et d’infiltration de la vie quotidienne. Il joue avec les motifs et les formes, les couleurs criardes ou pastels, sortant souvent du cadre conventionnel du tableau. Les théories généralement simplistes et l’histoire de l’art qui séparent figuration et abstraction, sont avec Carlos Kusnir, mises à mal. Ses peintures portent en elles le souvenir de ses déplacements, façades, murs de briques, rideaux, nappes ou papiers peints, d’Argentine, d’Ukraine ou de République Tchèque. L’artiste joue sans cesse du rapport ambigu entre réalité et représentation. Il ne s’éloigne jamais beaucoup de la culture populaire et de la vie de tous les jours et c’est par cette simplicité qu’il injecte un indéniable sentiment de liberté à son univers.
Carlos Kusnir décolle ses peintures du mur, les pose à même le sol, ou les maintient de façon précaire dans l’espace à l’aide d’équerres de bois. Il invite à franchir le décor, à contourner les tableaux et les cimaises, laissant apparaître les piétements, la fragilité de la structure. Matériaux pauvres, contreplaqué déglingué, chutes de bois ou objets hétéroclites, chaises ou balai, bandes sonores qui accompagnent le tableau ; la peinture, à priori genre noble, déborde toujours du cadre. C’est en la mettant en danger, en équilibre incertain, en l’appuyant au mur simplement, en voulant l’extirper du contexte du musée, de l’exposition conventionnelle que Carlos Kusnir la donne à voir.
Pour le musée, il a imaginé un parcours mêlant des œuvres anciennes à des œuvres inédites, proposant ainsi une multitude de pistes pour aborder sa peinture. Plus qu’une exposition dans sa définition traditionnelle, il s’agit d’un véritable projet pictural : Carlos Kusnir installe la peinture. Il propose des va-et-vient entre l’ensemble et le détail, l’autonomie du tableau et le dialogue dans un ensemble plus vaste. Une grande façade recouverte de papiers sérigraphiés de motifs répétitifs se déploie dans l’espace d’exposition sur quinze mètres et diffuse la répétition au piano des variations Goldberg de Bach. La musique devient comme une couleur supplémentaire, une mise en écho du motif. La mélodie emprunte les lignes des arabesques du panneau vers l’infini. D’autres peintures accueillent un oiseau de facture parfaite sur un fond abstrait expressionniste. Evitant le piège du kitch, Carlos Kusnir réactualise le trompe-l’œil, ajoutant parfois même un objet bien réel dans la composition. Certains morceaux très habiles se voient recouverts d’un trait de peinture ou d’une tache, dans un jeu de rencontre entre les extrêmes. Une de ses fameuses toiles portant l’inscription « Je suis au café », posée sur deux chaises, harangue le spectateur avec humour et l’oblige à y regarder de plus près. La scène est une fiction, celle provocatrice de l’absence du sujet de la peinture mais surtout celle d’une peinture faussement précaire et désinvolte. Avec humour et dérision, Carlos Kusnir questionne le tableau et donne à voir la capacité inépuisable de la peinture d’échapper à elle-même, de se réinventer sans cesse.